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La résignation ou le panache

En matière de jeux, les grands éditeurs préfèrent un scénario connu, pour faire concurrence à d’autres jeux connus, et avoir un produit livré en temps et en heure, sacrifiant au besoin la finition.

Ninja Theory, petite société anglaise de design de jeux vidéo, était déjà connue par ses réalisations pour consoles Sony et Microsoft, de jeux RPG « Hack’n Slash », avec des fortunes diverses.

Ses membres ont eu à faire un choix : mourir à petit feu en réalisant des RPG insipides sur des scénarii imposés, avec un succès mitigé, ou tenter l’aventure d’un design beaucoup plus personnel sur une histoire complètement originale.

La seconde était forcément plus motivante pour ces gens créatifs, mais aussi nettement plus risquée. Aucun grand éditeur n’allait les financer parce que les critères étaient trop différents et le risque mal identifié.

« Allons-y » décident les aventuriers, considérant qu’au pire ils vont pouvoir développer ce qu’ils veulent comme ils le veulent. Ainsi nait le projet « Hellblade, Senua’s Sacrifice »

3 ans de funambulisme

Les voilà lancés dans une aventure à tous les niveaux : comment financer, quelle histoire raconter et comment.

Nos créateurs sont plus préoccupés par la minutie que par le respect d’un calendrier. Tous ces détails, et le temps pour les affiner, feront de la partie financement un exercice de funambulisme pendant tout le processus. Car le budget sera très serré, ce qui rend le résultat encore plus extraordinaire.

Pourtant, les collaborations nécessaires, ils les obtiendront, parce que leur projet commence à intéresser tous les spécialistes avec qui ils vont discuter (jusque dans des disciplines inattendues comme la mythologie nordique et la psychologie).

« A star is born »

Tout cela prendra du temps (3 ans) et exigera beaucoup de travail. Comme le budget est serré, ils pensent à sacrifier une ressource à laquelle les éditeurs ont recours : des acteurs connus, qui apportent une touche correctrice à la finition des jeux… Trop cher, surtout pour ce qu’ils veulent accomplir.

Difficile de savoir comment tout cela s’est passé, toujours est-il que, parmi cette équipe de créateurs graphiques peu portés, en principe, sur l’actuation, il y a cette photographe qui leur définit déjà les règles visuelles pour les cadrages (et les trailers, entre autres).

Elle s’appelle Melina Juergens, et c’est elle qui servira de modèle pour le personnage de Senua, guerrière nordique partie dans une quête désespérée. Son rôle ira bien au-delà de la modélisation graphique.

Le produit final : Senua’s Sacrifice

Le résultat graphique est bien entendu spectaculaire, avec des mouvements fluides et réalistes, comme il fallait s’y attendre.

Le gameplay est assez simple, encore que, comme toujours, il vous faudra échouer plusieurs fois. Pas très grave, le jeu est tellement beau graphiquement que cela vous permettra de faire durer le plaisir.

N’hésitez pas à vous faire aider en tapant « hellblade walkthrough » ou « hellblade gameplay » dans votre google habituel.

Ce qui est moins classique (et risqué) est le choix de décrire une psyché complexe et torturée, luttant autant avec ses démons intérieurs qu’avec des monstres extérieurs.

Note : les trailers rendent difficilement compte de l’ambiance toute particulière de ce jeu, qui a été copieusement récompensé, et dont le succès a dépassé largement les espérances de ses créateurs.

Retour au bercail ?

Le message porté par ce jeu a apparemment atteint son but : l’éditeur Microsoft a récemment acquis Ninja Theory (juin 2018). Etant donné le succès du jeu, les conditions offertes ont dû être très favorable, et il est vrai aussi que le profil de cette entreprise a toujours été la création plus que le business.

Chacun son truc, l’important est le respect. Il l´ont bien gagné.